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M.Obama et les Amérindiens

 

 

Dans le Montana, les Amérindiens sont devenus la nouvelle cible électorale

Le vote des Amérindiens compte dans l'Etat Du montana, où Barack Obama s'est rendu le 19 mai 2008.

Vous êtes l'enjeu de cette élection !",

a déclaré Barack Obama face à un public d'Amérindiens à Sioux Falls dans le Dakota du Sud, le 16 mai dernier. Les Amérindiens représentent 7 % de la population du Montana et près de 10 % de la population du Dakota du Sud, soit cinq fois plus que la moyenne nationale. Au cours du mois de mai, Barack Obama, Hillary et Bill Clinton ont parcouru ces deux Etats de la région des grandes plaines qui s'apprêtent à voter mardi 3 juin. La longévité exceptionnelle des primaires côté démocrate a mis en lumière cet électorat traditionnellement ignoré des candidats à la présidentielle. "Cela n'est jamais arrivé auparavant", s'est exclamé Jacqueline Johnson, la directrice de l'organisme représentatif National Congress of American Indians.

Le directeur du journal Native Voice, Frank King, souligne que les tribus ne votent pas comme les autres électeurs : "Lorsqu'un candidat se rend dans une réserve indienne, il s'adresse à une grande famille ; il peut recueillir le vote de dix mille personnes d'un coup." Le 20 mai dernier, Hillary Clinton pointait du doigt les erreurs de l'administration Bush devant un auditoire qui garde en mémoire les années prospères de l'ère Clinton. "Les Amérindiens ont eu un partenariat productif avec l'administration Clinton dans les années 1990", se souvient Lula Red Cloud, un des chefs de la tribu des Sioux, qui soutient la candidate.

Au sein de cet électorat traditionnellement démocrate, le candidat républicain pourrait cependant jouir d'une certaine influence. "John McCain séduit quelques leaders de la population amérindienne en raison de sa carrière militaire, respectée, mais aussi parce qu'il a présidé le Comité des affaires indiennes", explique Wayne Stein, professeur à l'université d'Etat du Montana et membre de la tribu Turtle Mountain Chippewa. Le sénateur de l'Arizona a des contacts fréquents avec la population "native" de son état et s'est entretenu pendant la campagne avec les chefs des tribus du Nouveau-Mexique, dont la population amérindienne est la plus importante du pays.

 "JE SAIS CE QUE C'EST QUE DE LUTTER"

 

Mais Barack Obama a surpris tout le monde. Largement méconnu, le candidat démocrate "est allé le plus loin dans ses propositions", selon Frank King. Il s'est engagé à nommer un conseiller chargé de la politique amérindienne au sein de sa garde rapprochée à la Maison Blanche, s'il venait à être élu.

Le 16 mai, M. Obama s'est réuni en privé avec une cinquantaine de chefs tribaux à Sioux Falls, la plus grande ville du Dakota du Sud. Selon Lise King, qui a participé à l'organisation de la réunion, "une relation avec les Amérindiens se fonde sur la confiance".

La défense de la souveraineté des "nations tribales" est aussi une idée chère, "que les Blancs ici n'aiment pas entendre", souligne Frank King, faisant allusion au racisme qui sévit dans la région. Une raison supplémentaire, selon lui, qui explique le ralliement des Amérindiens au candidat de la minorité noire. "Je sais ce que c'est que de lutter (…) combien de fois on vous a oubliés, tout comme les Noirs ou d'autres groupes dans ce pays. Parce que j'ai vécu cela, je ne vous oublierai pas", a promis le candidat.

Si Obama part gagnant dans le Montana et le Dakota du Sud, les défis que connaît la population amérindienne de ces Etats transcendent les partis ou les candidats, confie Robert Moore, un membre du conseil des Sioux de la ville de Rosebud dans le Dakota du Sud. "Nous parlons d'enjeux touchant à la vie et à la mort", explique-t-il dans le journal local Argus Leader, alors que les réserves indiennes de cette région, épargnées par les revenus des casinos, sont des ghettos où sévissent pauvreté, violence, chômage et consommation de drogues.

Cécile Grégoriades  Sources Le Monde

Barack Obama courtise l'électorat amérindien

Barack Obama, ici à Sante Fe, au Nouveau-Mexique, a promis vendredi de porter une attention toute particulière au sort des populations amérindiennes des Etats-Unis, proposant, s'il est élu, d'instituer des réunions annuelles avec les chefs des différentes tribus. /Photo prise le 1er février 2008

ALBUQUERQUE, Nouveau-Mexique (Reuters)

Barack Obama a promis vendredi de porter une attention toute particulière au sort des populations amérindiennes des Etats-Unis, proposant, s'il est élu, d'instituer des réunions annuelles avec les chefs des différentes tribus.

S'exprimant depuis le Nouveau-Mexique, le candidat à l'investiture démocrate a souligné que les populations amérindiennes étaient les moins bien loties des Etats-Unis en matière de santé, d'éducation, de mortalité, de chômage et d'addictions.

"Il ne fait guère de doute que nous avons des devoirs particuliers envers les communautés amérindiennes et que nous devons travailler avec les représentants de leurs tribus pour résoudre tous ces problèmes", a lancé le sénateur de l'Illinois.

Obama a déclaré qu'il faudrait investir davantage dans les écoles et dans les programmes de prévention, et promis de désigner un responsable des relations avec les Amérindiens s'il s'installe à la Maison blanche.

"En tant que président des Etats-Unis, je ne vais pas me contenter d'un bureau des Affaires indiennes qui restera sur la touche la plupart du temps", a-t-il dit.

"Je vais réunir un sommet annuel avec tous les dirigeants amérindiens et avec les chefs des tribus. Ils s'entretiendront directement avec moi."

Selon un recensement effectué en 2005, la population d'Amérindiens sur le territoire des Etats-Unis compterait 4,5 millions d'individus.

Jeff Mason, version française Nicolas Delame (Le point.fr)

19 janv. 2009 ÉTATS-UNIS

Les Amérindiens aiment Obama sans réserve (ou presque)  

Maltraités par l'histoire, les Amérindiens se sont enflammés pour Barack "Aigle Noir" Obama, dont ils espèrent beaucoup.

 

(Les indiens Crows et Barack Obama pendant sa campagne dans le Montana, en mai 2008)

Il y a près de cinquante ans, un Indien Pima montait dans un bus de la compagnie Greyhound et quittait sa réserve écrasée de soleil pour le froid hivernal de Washington afin d'assister à l'investiture d'un jeune président américain. "Quand mon père est rentré, il était tout excité parce que John Kennedy l'avait salué quand il était passé à côté de lui lors de la parade, raconte Diane Enos. Le président avait salué un Indien ! Il ne parlait plus que de cela." Pour le 20 janvier, Diane Enos fera le même voyage, tout comme des centaines d'Amérindiens, qui attendent énormément de Barack Obama.
Ce jour-là, le "Great White Father" [le Grand Père blanc] sera noir. Pourtant, loin de l'euphorie et du bouillonnement d'idées, certains demeurent sceptiques. "Obama reste un homme politique, et moi je reste indien", lance le célèbre écrivain amérindien Sherman Alexie. "Je trouve qu'ils ont tous l'air de signataires de traité", poursuit Alexie, paraphrasant le musicien indien [d'origine sioux] John Trudell. "J'imagine que c'est ce qu'il y a de déroutant et aussi de touchant dans l'amour qu'éprouvent les Indiens pour Obama. Ils sont nombreux à avoir remisé leur méfiance à l'égard des politiques."

Très souvent, ces premiers Américains sont invisibles, figés à jamais dans des images mythiques du passé. Ils sont présents sur les photos de Curtis et dans les tableaux de Remington et nous entendons parler d'eux à travers ce qu'en disent les milieux new age. Ils sont cools, ces Indiens. Et puis, dès qu'un nouveau casino ouvre près de l'autoroute, ou qu'une exposition de poteries fait parler d'elle, nous nous rendons compte qu'ils sont toujours là, parmi nous. Avec l'ascension d'Obama, les Indiens se sont autorisés à rêver – et même, pour certains, à tomber amoureux. En mai dernier, il a été adopté par une famille indienne du Montana, et a reçu de la nation crow le nom de Barack Black Eagle [Barack Aigle Noir].

 
Le combat épique des Amérindiens a toujours consisté à essayer d'éviter de se faire engloutir par la culture dominante. Les Indiens représentent moins de 2 % des 300 millions d'Américains. La perte de leurs territoires a eu des effets dévastateurs. Les Indiens meurent plus jeunes que la plupart des Américains, ils souffrent de taux de suicide plus élevés, d'alcoolisme et de problèmes nutritionnels.
Les Pimas, qui s'accrochent à leur réserve de 52 000 acres [210 km2] au cœur de l'expansion tentaculaire de la région de Phoenix, connaissent l'un des taux les plus élevés au monde de diabète de type 2, conséquence de leur difficulté à s'adapter au monde des Européens.
 
Les présidents ne font que passer. Ils promettent de faire respecter les traités, et de nommer pour superviser les affaires concernant les Indiens quelqu'un qui comprendrait enfin que l'histoire n'a pas pris fin avec Custer [l'une des principales figures des guerres indiennes du XIXe siècle, mort en 1876 à la bataille de Little Big Horn]. C'est en général la routine associée à un mépris douloureux pour les réserves.

Mais le jour des élections, dans la réserve navajo, qui s'étend sur trois Etats et qui est de la taille de la Virginie-Occidentale, des lycéens avaient installé des panneaux de soutien à Obama aux carrefours de la ville de Window Rock, et ont hurlé leur joie jusqu'à en être aphones à l'annonce des résultats. "J'éprouve une joie indicible", explique Joe Shirley Junior, président de la nation navajo. "Le pays navajo tout entier était derrière Obama." Près de la moitié des familles navajo se chauffent avec du bois qu'elles vont couper elles-mêmes, boivent de l'eau dans des tonneaux et s'éclairent au kérosène, explique-t-il. Il suffirait de 1 milliard de dollars, soit une part infime de ce que les contribuables vont donner aux institutions financières responsables du crash de 2008, pour que le pays navajo jouisse du confort moderne, souligne Shirley.
 
Mais, au-delà de ce besoin urgent et fondamental d'infrastructures, les Indiens attendent autre chose d'Obama, quelque chose de plus fort. Ces gens qui ont été spoliés avec une brutalité proche du génocide se sentent proches de ceux dont les ancêtres sont arrivés ici enchaînés, même si Obama est le fils d'un immigré. "Il y a un lien très fort qui s'est créé, poursuit Shirley. Qui se ressemble s'assemble. Nous essayons d'enseigner au peuple navajo que rien n'est impossible. L'élection d'Obama parle tout particulièrement aux jeunes."

Le cynisme est un poison qui ronge le cœur de nombreux jeunes. Dans le pays indien, où le désespoir imprègne jusqu'au paysage, il s'installe dès le plus jeune âge. Et quand Diane Enos, présidente de la communauté indienne Pima Maricopa de Salt River, se rendra à Washington mardi, elle emmènera avec elle un chef de tribu adolescent. "La quête de l'identité est au cœur de la vie d'Obama, dit-elle. C'est le combat des Indiens. Et cette quête commence avec les enfants."

 
Dans la foule gigantesque des Américains qui viendront acclamer le président, il y aura un petit contingent de personnes qui sont liées à ce continent depuis plus longtemps que quiconque. Et pour une fois, même si cela ne devait peut-être durer qu'un temps, ils auront enfin le sentiment d'être américains.

Timothy Egan
The New York Times

 

Barack Obama devra aussi se pencher sur le cas de Léonard Peltier. Injustement condamné pour un crime qu'il n'a pas commis. Ce sioux Lakota croupit depuis le 06 février 1976 dans une cellule du pénitencier de Lavenworth au Kansas. Procès bâclé, preuves fabriquées, témoignages frauduleux ont permis la condamnation à perpétuité du pacifiste « guerrier ». Léonard adhérait à l'Américan Indian Movement, ce qui explique peut-être son infortune. Il a reçu le soutien de Rigoberta Menchù Tum (Prix Nobel de la paix), Desmond Tutu, Danièle Mitterrand et Renaud. En 1993, Bill Clinton a admis que le dossier devait être réexaminé.

 

Le nouveau Président pourra-t-il faire libérer enfin Léonard Peltier?

 

L'Union.presse.fr

 

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